« Echec total » du multiculturalisme allemand selon Angela Merkel
En voilà une déclaration bien surprenante ! Alors que le président allemand, Christian Wulff, arrive aujourd’hui en Turquie pour une visite de quatre jours, Angela Markel a contribué à entretenir le débat enflammé sur l’immigration hier à Potsdam, lors d’un congrès réunissant la jeunesse de la CDU allemande. En effet, elle a tenu a souligné l’échec du « multikulti » allemand, tout en estimant que l’intégration des immigrants restait problématique et souvent très incomplète. C’est un thème récurrent dans la vie politique allemande en ce moment. La rencontre footballistique Allemagne-Turquie du 8 octobre dernier était d’ailleurs nourrie d’une tension perceptible, puisque plus de 30000 Turcs étaient dans les tribunes à Berlin, et que c’est l’allemand Mesut Özil, d’origine turque, qui a contribué à la large victoire allemande (3-0).
Ce débat, c’est l’ouvrage du social-démocrate Thilo Sarrazin, L’Allemagne se détruit, qui l’a relancé. Cet ancien membre de la Buba (Bundesbank ou Banque centrale allemande) y dénonce l’immigration de populations musulmanes en Allemagne comme un fléau qui minent la société allemande et qui seraient intellectuellement inférieures. Malgré le tollé provoqué par le contenu, très controversé, de ce livre, force est de constater que la population allemande s’est montrée très réceptive à l’argumentation de Thilo Sarrazin, signe que ce dernier a su exprimer de façon polémique ce que certains Allemands pensent des immigrés, notamment turcs. Les Turcs sont en effet plus de 2,5 millions en Allemagne (sur quatre millions de musulmans dans le pays) et forment la première communauté ethnique.
Ainsi, les déclarations de Mme Merkel semblent être avant tout un coup politique visant à obtenir les faveurs de l’aile conservatrice de son parti, et ce à quelques mois des élections régionales de 2011. D’ailleurs, elle s’est également efforcée de ne pas froisser l’aile gauche du parti, en se déclarant par ailleurs favorable à l’immigration et indiquant que « l’islam fait partie de l’Allemagne ». Elle a ainsi rappelé que l’Allemagne avait besoin d’environ 400 000 travailleurs qualifiés. Cela nuit en effet à hauteur de 1% à la croissance allemande selon la chambre de commerce et d’industrie. Pourtant, la Turquie reste un partenaire commercial de premier ordre pour l’Allemagne, même si Mme Merkel s’est toujours opposée à l’intégration turque à l’UE.
Reste à savoir si ce numéro d’équilibriste de la part de la chancelière aura les effets escomptés, d’autant que personne n’est dupe en Allemagne : tout le monde a en effet bien compris l’enjeu politicien (et non pas politique) d’un tel débat…